Ce soir, juste après le bain avec ma fille, alors que je me rinçais les cheveux… j’ai craqué. J’ai fondu en larmes. Derrière mon rideau de douche, la tête sous l’eau… alors que l’amoureux séchait et habillait notre fille… j’ai pleuré. Il fallait que ça sorte. J’ai l’estomac retourné, le coeur qui se comprime et ma tête prête à exploser. Ce soir, j’ai envie de baisser ma garde et mon positivisme que je m’efforce de garder depuis une semaine malgré tout, malgré la pandémie du coronavirus. Je ne suis certainement pas la seule à ressentir cela, et peut-être qu’en mettant mes mots noir sur blanc ça ira mieux. C’est purement égoïste de partager cela ici aujourd’hui car je ne cherche pas à ce que l’on compare nos sentiments. J’ai juste besoin que ça sorte…
En dépit de la situation actuelle, j’ai tenté de voir le positif et les petits bonheurs du jour… J’ai tenté de les partager sur instagram, peut-être pour garder une trace de ce moment tristement historique que nous vivons mais surtout et essentiellement pour m’encourager à garder espoir et sourire. Simplement pour ne pas sombrer. Essayer de nourrir mon loup blanc intérieur plutôt que mes démons…
Ce soir, la réalité me rattrape… ou plutôt me met violemment une claque, voir me retourne, m’arrache et piétine mes tripes. Ce soir, la peur m’envahit et me paralyse.
Si dans un premier temps, je n’ai que trop peu entendu parlé du coronavirus ou covid-19, considérant que « c’était une petite grippe » comme nous le répétait certains médecins à la TV française. J’ai bien vite était confronté à la réalité. Est-ce le retour de ma petite soeur en France, ou l’apparition de la fièvre et de nos premiers symptômes qui m’ont fait réaliser que cette « merde » était belle et bien là… je ne sais plus. Je ne sais toujours pas.
Une chose est sûre, j’ai commencé à suivre l’actualité aussi bien en France qu’au Canada alors que je fuis en général toute forme d’information et de mauvaises nouvelles. Là, je ne pouvais m’en empêcher. Je scrollais, matin et soirs (voir plusieurs fois par jour) tous les journaux sur internet ainsi que les sites du gouvernement afin d’avoir la moindre information et connaître le nombre de malades et de morts en temps réel. C’était devenu incontrôlable et frénétiquement, je lisais encore et encore… Aussi tordu que cela puisse paraître, ça me calmait de savoir et de « maîtriser l’information ». Mais, on ne va pas se mentir, ça entretenait également mon angoisse et stress qui n’ont cessé de gagner du terrain depuis.
Ce soir… j’ai fini par craquer. Pourquoi maintenant? Pourquoi sous la douche?
Tout simplement, parce qu’après avoir appelé le 811 et le numéro vert du Coronavirus mardi, mercredi puis jeudi suite à nos symptômes à mini Soulier vert et moi qui ne disparaissaient pas et au contraire, qui s’intensifiaient, nous sommes allées nous faire dépister hier après-midi. A l’hôpital de Thetford, en restant dans sa voiture comme au drive du Tim Hortons ou de la pharmacie, un médecin vient à votre rencontre pour faire les prélèvements et vous tester pour le covid-19. Alors ce soir j’ai craqué car je n’aurai les résultats que dans trois jours. Que pendant ces trois jours et même depuis le confinement décidé le 13 mars par la France (à moins que ce ne soit depuis le 11 mars et la déclaration de la pandémie mondiale), j’ai tenté d’occuper mon cerveau avec mille et une pensée ou activités. Mais là, ce soir, en prenant le bain avec ma fille… en la voyant jouer et rire… insouciante… j’ai repensé à cette publication d’une infirmière qui expliquait que les personnes hospitalisées du covid-19 était et mourait seule. Que les infirmières n’avaient pas le temps de donner des nouvelles aux familles exceptées quand c’était trop tard. Et que les familles de ces personnes ne pouvaient dire au revoir à leurs proches mis à part avec cette visite de 10 min. Bref, en voyant ma fille dans le bain, j’ai essayé de m’occuper l’esprit et de garder le sourire en lui chantant des Disney alors que je suis incapable de retenir les paroles… Alors, en me rinçant, une fois le rideau de douche tiré et que l’amoureux habillait notre fille, j’ai paniqué. Et si nos tests étaient positifs? Et si notre état dégringolait? Je sais bien qu’avec des « si » on pourrait refaire le monde. Mais croyez-moi, l’attente est aussi un calvaire surtout lorsqu’on voit la fièvre et la toux de votre bébé ne pas disparaître. Aucune amélioration. Et qu’on voit le nombre de malades et de morts s’intensifiaient.
Ce soir… je me suis effondrée car je ne sais pas de quoi sera fait demain. Je ne sais pas quel monde je vais pouvoir offrir à ma fille qui est encore si petite. Je ne sais pas combien de temps cela va durer et j’ai l’impression que le Québec ne prend pas assez de mesure pour notre santé et sécurité. Le confinement n’est pas encore obligatoire car le gouvernement préfère « conseiller que contraindre » comme dirait le médecin conseil de notre ministre François Legault. Sauf que voilà, à Thetford mines, je vois que trop bien que la distension sociale n’est pas respectée, que les gens sortent, se côtoient et ne prennent pas au sérieux les gestes barrières (se laver les mains, tousser dans son coude, garder 1m de distance…). A croire que les 5000 km avec l’Europe nous protègent de ce virus alors qu’on sait que c’est faux! A croire que les québécois sont aussi arrogants que les français pensant que ça n’arrive qu’aux autres!
Est-ce qu’en tant qu’expatriée, j’ai ce double regard de mes deux pays et de ces deux crises? En tant qu’expatriée, je suis attachée et sensibilisée à ce que vit mon pays d’origine et particulièrement touchée alors qu’au Québec, les choses ne sont pas encore si grave. En tant que française expatriée, je vis à travers l’actualité française ce qu’il se passe et je me dis que ça va arriver ici, que c’est notre avenir.
Ce soir, je réalise que je ne peux offrir un monde sécuritaire à ma fille. Que je suis impuissante face à cette situation. Qu’en dépit de l’isolement volontaire puis de la quarantaine dans laquelle nous sommes, cela ne veut pas dire que nous sommes protégés. Une chose est sûre : même si les résultats reviennent négatifs, cela ne voudra pas dire qu’on est protégé et qu’on ne l’attrapera pas? La prochaine fois que j’irai faire les courses, la prochaine fois que j’irai chercher des médicaments… je croiserai quelqu’un qui ne prendra peut-être toujours pas la situation au sérieux. Combien d’enfants ai-je vu dans la rue devant chez moi? Combien d’ainés ai-je vu marcher ensemble et papoter comme si de rien était? L’individualisme et l’égoïsme de chacun nous met en danger.
Ce soir, je vous le dis…j’ai peur. Peur d’être contaminée, peur de mourir, peur qu’il arrive quelque chose à ma fille. Et si ce n’était pas le cas, l’avenir que nous offre le monde à l’heure actuelle me fait peur. Les frontières se ferment les unes après les autres et les règles se durcissent pour notre bien. Mais combien de temps cela va-t-il durer? Quand reverrai-je ma petite soeur, ma famille ou mes amies? Comment va-t-on s’en sortir financièrement? Quel monde va-t-on retrouver une fois la pandémie stoppée? Va-t-on enfin changer nos habitudes et prendre soin de notre planète avant qu’il ne soit trop tard? En étant expatriée, j’ai l’impression qu’on prend double peine : on subit à distance ce que vit la France et on vit ce qu’il se passe ici.
Bref, ce soir, j’avais envie d’écrire tout ce que je ressens sans me poser la moindre question, sans réfléchir, sans devoir me plier à cette image parfaite que beaucoup de gens attendent de nous. Sans devoir me relire. Ce soir, j’avais juste envie d’exprimer ma colère, mes craintes et mes doutes et d’appuyez sur « publier ». Demain, ça ira mieux… Demain, je redeviendrai positive et optimiste. Mais ce soir, j’ai juste besoin de le dire haut et fort et de pleurer un bon coup.
Prenez soin de vous,
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Ton article m’a beaucoup touché ❤️ Prenez soin de vous 🌈 Ca va bien aller.. je l’espère de tout mon cœur pour l’avenir de nos enfants 😘
De tout cœur avec toi... Ici, je suis en Suède, et même politique : conseiller et non contraindre. J'ai peur, tout le temps. Même mes proches qui sont des gens intelligents ont des réactions que je trouve dangereuses (continuer à aller à la salle de sport par exemple).
Je tousse depuis une semaine, les hopitaux refoulent les gens et on refuse de faire les tests. Le pays est déjà en crise au niveau des hôpitaux (le système de santé est déjà bien critiqué de base) alors j'ai peur. Pas forcément pour ma vie, mais pour ce qui nous attend tous.
J'ai la même attitude : regarder les infos, les chiffres, mais c'est vrai que c'est anxiogène. Je pense arrêter quelques jours, de toutes façons les choses changent tellement vite qu'une info donnée un jour est périmée le lendemain...
Courage... on parle beaucoup des décés c'est vrai mais il faut savoir malgré tout qu'il y a davantage de guéris que de morts... et qu'il faut essayer de rester à la maison le plus longtemps possible avant d'entrer à l'hôpital car tout ceux qui vont à l'hôpital ne resortent pas forcément étant donné que tous les patients, même ceux qui vont très bien et qui ont juste une fièvre à 38, se font intuber et plonger en coma artificiel, un procédé très lourd qui provoque plus de morts que le virus lui-même. Alors patience et courage à la maison avant toute chose, vraiment, si vous l'avez, restez au chaud tant que vous n'avez pas de difficultés trop importantes à respirer. Aller à l'hôpital c'est pire actuellement...
Bonjour Sarah,
Je ne sais pas si tu auras ce message mais je tente tout de même.
Avec cette belle saloperie qui se propage, j'ai pensé à toi, a vous...
Je croise les doigts pour vous pour les résultats du test mais garde espoir. Il le faut.
Une chose peut peut-être te rassurer, ça ne touche pas les enfants. Ils sont porteurs et contaminent mais heureusement ne déclarent pas la maladie.
J'espère que chez toi les gens vont vite prendre conscience de l'ampleur de la catastrophe.
Ici nous somme confinés depuis 1 semaine, les enfants ne vont plus a l'école. Demain, il y aura probablement une annonce de prolongation et renforcement du confinement, voire de couvre-feu pour le Grand-Est car nous sommes très touchés.
Je ne te cache pas que l'ambiance n'est pas a la fête et l'inquiétude est partout.
Rémi et moi avons eu une très vilaine grippe il y a un mois. C'était peut-être déjà ça, sachant que j'ai eu bcp de mal a m'en remettre. Encore aujourd'hui, j'ai le souffle court. On ne sait pas parce que les tests ici ne sont pas effectués systématiquement.
J'espère que tes proches de portent bien.
Soyez très prudents et prenez soin de vous. Plein de courage.
Aude
PS : ni cortisone ni anti-inflammatoires, ça favorise le développement des symptômes.
Ressentir du stress, devenir encore plus anxieux que d'habitude sont des sentiments normaux compte tenu du contexte dans lequel on est... Pour me soulager, je fais des exercices de relaxation et des colonnes de BECK pour gérer mon pensées négatives (les pensées alarmistes).
J'espère que cette crise sera bientôt derrière nous,
Prends soin de toi,
Line de https://la-parenthese-psy.com/
Bonjour, je lis ton article dévastée, je te souhaites tellement de courage dans cette situation, ça n'est pas simple en effet on ne sait pas où on va, mais on y va. Il faut que tu restes positives, c'est vrai, l'issue n'est pas seulement la mort il y a aussi de la guérison. Il faut continuer à voir le positif, c'est très important. Je n'ai pas de conseils autre que celui-ci à te donner car moi même je surveille ma température deux fois par jour dans la panique de voir un 38. Mais c'est une mauvaise passe, elle est impressionnante cette maladie j'en suis certaine, mais tout passe. Continue d'avancer, ca ira pour toi et ton enfant. COURAGE ET JE T'ENVOIE PLEIN DE FORCE !